A.N.P.E.

 

Cour des Comptes

 

RAPPORT 2000

 

Réponse du Président de l’Agence nationale pour l’emploi

 

Comme le note la Cour, l’Agence nationale pour l’emploi a connu une profonde évolution depuis sa création. Cette évolution a été particulièrement sensible sur la période prise en considération qui a vu se concrétiser un important effort de modernisation dans le cadre des contrats de progrès conclus avec l’État et dans un contexte marqué par une constante augmentation du chômage.

 

Les moyens de l’Agence ont de ce fait été significativement accrus. Il convient toutefois de rappeler que selon l’O.C.D.E., le service public de placement français figurait au début des années 1990 parmi les moins bien dotés d’Europe occidentale ; une étude conduite sur des données de 1997 par un cabinet spécialisé a montré en outre qu’à périmètre comparable il subsistait un net sous-dimensionnement des effectifs et des budgets de l’A.N.P.E. par rapport à ceux dont bénéficient ses homologues britanniques, allemand et suédois.

 

Cette situation rend d’autant plus indispensables les efforts que l’Agence continue de déployer en vue d’atteindre une utilisation optimale des moyens mis à sa disposition.

 

A cet égard, l’Agence souhaite souligner que les points les plus importants évoqués par la Cour pour illustrer des manquements à la rigueur budgétaire et financière ne relèvent pas de sa responsabilité mais de dispositions arrêtées par l’autorité de tutelle concernée qu’en sa qualité d’Établissement public à caractère administratif elle était tenue d’appliquer. Au demeurant, sur la question principale concernant les mesures pour l’emploi, les pratiques seront modifiées dès 2001 dans le sens souhaité par la Cour.

 

En ce qui concerne les nouvelles technologies de l’information et de la communication, l’Agence a développé sur une grande échelle l’utilisation d’Internet ; le site anpe.fr est de très loin le site emploi le plus fréquenté par les internautes avec près de 70 000 visites par jour et elle vient d’obtenir le financement lui permettant d’en augmenter encore les fonctionnalités pour l’amener au niveau des sites emploi les plus modernes. Son principal projet informatique (GEODE) s’appuie sur une technologie qui, au moment de son lancement, était particulièrement innovante au niveau européen, voire mondial.

 

Elle ne voit pas davantage en quoi une rigidité grandissante affecterait la gestion de son personnel. Dans ce domaine comme dans celui de la gestion en général, l’A.N.P.E. doit, de par les objectifs stratégiques fixés dans ses contrats de progrès, concilier un cadre d’activité administratif avec une organisation et un management qui sont ceux d’une entreprise de service.

 

Au contraire de ce qui est avancé, l’Agence a sollicité et obtenu d’importantes marges de souplesse comme en témoignent l’instauration très novatrice d’éléments de rémunération liés aux performances atteintes (individuelles et collectives) et la gestion en masse indiciaire globale de ses emplois.

 

S’agissant de son activité, l’Agence dispose bien d’indicateurs nombreux et fiabilisés. Son conseil d’administration suit régulièrement l’évolution des onze plus significatifs sur une centaine au total. Parmi ceux-ci, certains rendent compte avec pertinence de l’exercice de sa mission en matière de placement, notamment celui des offres satisfaites par mise en relation à l’initiative de ses services.

 

L’Agence se réjouit que d’évidents progrès aient été constatés dans ses résultats mais n’a pas le sentiment que ces résultats tendent à plafonner. Elle souhaite rappeler que dans une conjoncture économique défavorable, le nombre d’offres d’emploi recueillies par ses agences est passé de 1 211 000 en 1992 à 2 785 000 en 1998 (il devrait être de 3 250 000 en 2000) et sa part de marché a presque doublé.

 

Dans une conjoncture économique désormais favorable, situation qui favorise un retour plus rapide vers l’emploi des actifs qui en sont le plus proche, il est d’autre part particulièrement significatif que le chômage de longue durée ait baissé de 32 % de septembre 1998 à septembre 2000 alors que le chômage total a baissé de 23 % durant la même période.

 

Ce fait, sans équivalent depuis la création de l’A.N.P.E., laisse à penser que ses actions prioritaires en faveur de la réinsertion des publics en difficulté ont démontré leur efficacité.

 

Il n’est sans doute pas sans rapport avec l’évolution positive de l’appréciation portée à son égard par l’ensemble de la population. La dernière enquête du CREDOC sur le mode de vie et les aspirations des français montre que 61 % d’entre eux contre 41 % en 1997 pensent que les services rendus par l’Agence se sont améliorés et ils sont également 61 %, contre 53 % en 1997 à estimer qu’elle est plutôt efficace pour mettre des offres d’emploi à la disposition des demandeurs. Une enquête auprès des maires de France va dans le même sens ; une nette majorité des élus considère que l’Agence est devenue plus efficace au cours de ces dernières années et qu’elle joue un rôle important dans l’action locale pour l’emploi.

 

Dès lors qu’une conjoncture économique favorable produit pleinement ses efforts, les missions prioritaires qui lui sont confiées par les pouvoirs publics et les partenaires sociaux, au travers de l’accompagnement personnalisé vers l’emploi de l’ensemble des chômeurs et d’une action soutenue pour remédier aux difficultés de recrutement des entreprises, donnent très clairement à l’Agence Nationale pour l’Emploi vocation à conforter son rôle d’opérateur majeur sur le marché du travail.

 

La mobilisation des moyens

  

Une bonne part des critiques de la Cour concernent des points qui ne relèvent pas de la responsabilité de l'Agence

 

  La Cour relève des utilisations contestables  du fonds de roulement de l'Agence pour équilibrer son budget face à l'insuffisance de sa subvention soit en loi de finances initiale, soit lors de régulations budgétaires. L'Agence ne disposait pas de pouvoir décisionnaire en la matière et a régulièrement alerté ses tutelles sur les incidences des décisions prises.

 

De même, la Cour critique le financement de mesures nouvelles informatiques en cours d'année, que la subvention ne permettait pas de prendre en compte dans son budget primitif. Ces mesures avaient été proposées dès l'origine par l'Agence, mais l'accord de ses tutelles avait été différé.

 

La Cour critique le mode de budgétisation des mesures pour l'emploi, traduisant "une application quelque peu relâchée du principe d'annualité". Cette situation résulte de la difficulté de concilier ce principe avec celui, imposé également par la réglementation de la Comptabilité Publique, du caractère limitatif des autorisations budgétaires, qui constituent des autorisations d'engagement de dépenses avant d'être des prévisions de paiement.

 

L’Agence a apporté d’importantes modifications à ses systèmes d’information de gestion des mesures pour l’emploi et de gestion budgétaire en vue de satisfaire aux demandes de la Cour. Ces modifications seront mises au service dès l’exercice 2001. La gestion budgétaire sera en effet réalisée non plus sur des engagements de dépenses pluriannuels, mais sur la base des paiements effectués au cours de l’exercice, suivant en cela la logique adoptée par l’État pour son budget. Elle continuera néanmoins à comptabiliser ses engagements, base indispensable à une telle prévision budgétaire.

 

La Cour souligne les décalages constatés entre la perception par l'Établissement du financement des mesures pour l'emploi et le paiement des aides aux bénéficiaires. L'Agence se réjouit que ses demandes d'un financement régulier et ajusté à ses besoins de trésorerie aient été prises en compte par la mise en oeuvre d'un nouveau dispositif en 1996 en ce qui concerne le financement FNE et en 2000 pour le FEDOM.

 

L'Agence souhaite par ailleurs qu’il soit donné suite à ses demandes réitérées afin qu’elle puisse opérer un apurement rapide des dossiers d'aides à l'embauche.

 

La suggestion de la Cour de charger l'Agence de recouvrer directement le cofinancement par les départements des emplois RMI correspond à une demande ancienne de l'établissement qui semble en bonne voie d'aboutir.

 

L'Agence ne peut que regretter qu’il n’ait pas été donné suite, notamment par les partenaires sociaux, à ses propositions concernant les relations financières avec l'AGCC, critiquées par la Cour.

 

La Cour considère que l'Agence devrait assurer une gestion active de sa trésorerie. Cela ne peut se réaliser que dans le cadre des accords donnés par le ministère de l'économie et des finances à l'agent comptable de l'établissement, qui en est responsable. La direction de l'Agence est prête à accorder son concours à ce dernier.

 

La Cour relève que la capacité immobilière de l'établissement ne s'adapte qu'avec retard à l'arrivée de personnels supplémentaires. L'Agence ne peut que regretter que cette question n'ait pu être prise en compte dans la fixation de sa subvention de fonctionnement.

  

D’autres observations de la Cour appellent les réponses suivantes

 

La Cour met en avant le fait que, conformément aux instructions budgétaires et au statut de l'établissement, les financements des mesures pour l'emploi figurent en section de fonctionnement du budget de l'établissement pour dénoncer la difficulté de lecture de ces documents qui en résulterait. Il convient d'observer que ces financements sont intégralement retracés, tant en recettes qu'en dépenses, sur des comptes individualisés. Il ne peut être soutenu qu'une confusion serait entretenue entre la gestion des aides et les autres dépenses de l'établissement. De surcroît, tous les documents budgétaires de l'Agence font expressément apparaître isolément les recettes et les crédits inscrits à ce titre, ainsi que leur exécution.

 

Elle est surprise de constater que le rapport public de la Cour laisse à croire que le financement des mesures pour l'emploi aurait abondé le fonds de roulement de l'établissement alors que ses investigations, très approfondies, conduisent à la conclusion contraire.

 

La Cour relève le montant très élevé du fonds de roulement comptable à la clôture de l'exercice et laisse entendre qu'il a pu contribuer jusqu'à hauteur de 1,5 M.F. à l'équilibre du budget de l'Agence. Il convient de prendre en compte le fait que ce fonds de roulement a été exceptionnellement élevé en 1997 du fait de l'apurement d'opérations antérieures. Il a continuellement diminué depuis, en 1998 et en 1999 et devrait être considérablement réduit à la clôture de l'exercice 2000. Le fonds de roulement ne correspond ni à un montant de trésorerie disponible à une date déterminée, ni à des réserves libres d'affectation. En effet, les montants correspondants représentent pour un pourcentage très important, des reports d'engagements de dépenses et sont, dès qu'ils sont connus, immédiatement réaffectés à la couverture de ces derniers.

 

La Cour semble s'étonner de la forte évolution des dépenses de personnel de l'Agence.

 

Cette évolution n'est pourtant qu'une des contreparties de l'effort de modernisation de l'établissement réalisé sur la période :

 

- Tout d’abord, l'augmentation des effectifs résulte d'un relatif rééquilibrage des moyens de l'Agence par rapport à ses charges.

En effet, l’étude mentionnée ci-dessus montrait qu’à périmètre identique, et quels que soient les critères utilisés, les moyens humains dont disposait le service pour l’emploi français (y compris les réseaux jeunes et handicapés) en 1996 étaient très inférieurs à ceux des services publics pour l’emploi auxquels il était comparé.

 

En 1996, un agent en contact direct avec le public s’occupait en moyenne en France de 189 chômeurs. Le chiffre était de 133 en Allemagne, de 96 en Grande-Bretagne et de 58 en Suède.

Ni l’amélioration récente du marché du travail, ni les augmentations d’effectifs consenties à l’Agence les trois dernières années n’ont permis de rattraper ces écarts.

 

- La hausse de l'indice moyen budgétaire a tout d'abord été rendue possible par d'importants gains de productivité ayant permis une forte diminution du nombre des agents administratifs d'exécution. Elle est également le résultat d'une politique approuvée par les autorités de tutelle de l'Agence, d'augmentation de la qualification professionnelle des agents de l'établissement, requise par l'amélioration de sa qualité de service.

 

- Les revalorisations salariales intervenues à l'occasion du nouveau statut du personnel instauré par le décret du 29 juin 1990 ont tendu à réduire l'écart constaté entre les rémunérations des agents de l'établissement et ceux des autres composantes du service public de l'emploi. Un écart important au détriment des agents de l'ANPE, est toujours constaté aujourd'hui ; il constitue un frein à la mobilité entre les différentes composantes de ce service public et rend plus difficile la mobilisation des personnels dans un contexte de rapprochement des institutions.

 

Le jugement de la Cour sur le caractère élevé du taux d'absentéisme de l'Agence surprend d'autant plus que la Cour relève elle-même par ailleurs la féminisation du personnel de l'établissement qui induit une incidence de 20 % des congés maternité sur ce taux. Il convient également de rappeler que 86 % du personnel de l'établissement est en contact direct avec le public, très souvent en situation de grande difficulté. Une comparaison avec d’autres organismes publics ou privés, à population et missions à caractéristiques identiques, montrerait que le taux d’absentéisme de l’Agence ne leur est pas supérieur.

 

La Cour considère que le budget-temps consacré au paritarisme et aux activités syndicales à l'Agence est important. Il ne représente pourtant qu'environ 1 % du bugdet-temps global. Compte tenu de l'importance de l'enjeu que représente pour l'établissement un bon dialogue social, cet investissement maîtrisé ne paraît pas disproportionné. Au regard du temps consacré à ce dialogue, il apparaît que les budgets-temps perdus pour cause de grève sont très inférieurs à l'Agence à ceux que l'on peut constater dans beaucoup de services publics, voire privés.

 

En matière de dépenses informatiques, la Cour dénonce un processus budgétaire peu satisfaisant conduisant à un relâchement de la prévision et de la gestion. Il est exact que, compte tenu des contraintes de présentation des documents budgétaires imposées et difficilement conciliables avec les modes de construction du budget d'un établissement public mais également avec ses modalités d'exécution, des écarts étaient apparus. Cela n'est pas dû à un défaut de prévision de la part de l'Agence, qui a rédigé plusieurs schémas directeurs pluriannuels qui, s'ils n'ont jamais fait l'objet de réelles objections de la part de ses autorités de tutelle, n'ont jamais reçu une approbation explicite et n'ont pu servir réellement de base à la négociation budgétaire annuelle. Suite à un engagement proposé par l'Agence dans le cadre de la négociation du 3ème Contrat de Progrès, un audit externe des dépenses informatiques de l'A.N.P.E a été mené qui a conduit, pour la préparation de la loi de finances 2000 à établir une analyse partagée entre le ministère du budget et l'Agence du coût des mesures de reconduction de ce budget. Au sein de l'Établissement une harmonisation des pratiques budgétaires a été menée à bien, qui permet dorénavant de rendre compte des réalisations sur des bases homogènes avec les dossiers prévisionnels établis sur les normes de la direction du budget.

 

Le dépassement de 85 % du coût prévisionnel initial du projet GEODE relevé par la Cour ne correspond pas à un dérapage par rapport à un chiffrage d'origine mais à la prise en compte au-delà des mesures nouvelles informatiques stricto sensu d’un exercice budgétaire, des autres dépenses induites par un projet majeur et pluriannuel de l'établissement.

 

La Cour critique le fait que la mise à niveau de l'ensemble du parc informatique a été lancée "avant que les crédits aient été régulièrement mis en place". Il s'agit là d'une opération pluriannuelle, rendue nécessaire notamment par le projet GEODE, qui avait recueilli l'accord des autorités de tutelle de l'Agence. De plus et surtout, le principe de cette opération (même si ses modalités de financement n'étaient pas définitivement arrêtées) avait été acté au troisième contrat de progrès État-A.N.P.E.. L'Agence aurait été reprochable de ne pas avoir initié ce programme à temps, au risque de retarder GEODE et d'en renchérir les coûts.

 

En matière de marchés publics, la Cour recommande à l'Agence un réexamen rigoureux des pratiques suivies en ce domaine. Les "dysfonctionnements nombreux" dont il est fait état sont à relativiser par rapport au nombre important de marchés passés par l'Agence. S'agissant notamment des avenants tardifs, l'Agence en a expliqué les motifs, qui relèvent d'événements imputables aux titulaires et de la nécessité d’assurer la continuité du service. Toutefois l'Agence a, sans attendre son rapport, pris des dispositions correspondant aux préconisations de la Cour : renforcement des services juridiques tant au siège que dans le réseau et meilleure coordination entre eux, mise en place d'outils nouveaux de suivi des relations avec les fournisseurs, élaboration d'outils méthodologiques pour les services (guide des marchés publics diffusé en début septembre 2000).

 

D'autres dispositions sont en cours de mise en oeuvre : création d'un intranet juridique (comportant le partage d'un clausier sur les marchés), instruction sur l'exécution des marchés, réalisation d'actions d'information et de formation à destination de l'encadrement.

 

L’efficacité de l’Agence

  

La Cour dans ses observations souligne « qu’il est malaisé d’évaluer objectivement l’efficacité de l’A.N.P.E. en particulier dans sa mission essentielle de placier ». Cette difficulté tient en effet, à plusieurs causes : les profondes transformations de l’environnement économique et social, la complexification du cadre juridique et institutionnel fixé par les pouvoirs publics et les partenaires sociaux et la nature même des missions et objectifs assignés à l’Agence.

 

Dans ce contexte et s’agissant d’une démarche d’appréciation sur l’efficacité de l’Agence quatre remarques liminaires méritent d’être formulées.

 

Premièrement, il apparaît que très au-delà de l’action spécifique et bien délimitée d’un établissement public opérateur pour le compte de l’État qu’est l’Agence, la Cour analyse et critique à plusieurs reprises l’organisation du service public de l’emploi (SPE), la politique menée par les pouvoirs publics et les partenaires sociaux, et la manière dont leur action est menée. Par ailleurs, les comparaisons et diagnostics portés le sont souvent sans référence précise aux évolutions intervenues au cours d’une période longue (une dizaine d’années) et sans prise en compte des données les plus récentes.

 

Deuxièmement, dans une évaluation de l’efficacité d’une institution, il importe d’éclairer avant tout la façon dont les grands objectifs stratégiques assignés ont été, ou non, atteints. Pour mémoire, dans la période étudiée par la Cour, l’Agence s’est vue confier par l’État trois grandes tâches prioritaires successives : l’amélioration de l’accueil et de la prise en charge des demandeurs (1er contrat de Progrès), le repositionnement auprès des entreprises et la conquête d’une part de marché significative (2ème contrat de progrès) et la lutte contre le chômage de longue durée et l’exclusion (3ème contrat de progrès). Il convient de regretter que les commentaires de la Cour ne soient pas structurés en fonction de ces orientations.

 

Troisièmement, une approche rigoureuse de l’efficacité d’une institution suppose la prise en compte du jeu des contraintes et plus particulièrement du niveau des moyens mobilisés. Force est de constater dans ce domaine, qu’à part quelques considérations principalement budgétaires et financières, la prise en compte des moyens consacrés à ces  grands objectifs prioritaires n’est pas complètement faite. Pourtant les évaluations faites au cours du 2ème contrat de progrès (rapport intermédiaire d’avril 1997) comme les expertises confiées à des cabinets spécialisés externes (rapport de mai 1998) mettent fortement en évidence « un très important sous dimensionnement en moyens humains ».

 

Enfin, dernière observation liminaire, l’analyse de la Cour, centrée sur une vision très réductrice de « placier » de l’Agence ne prend pas en compte la diversité et la complexité des pratiques liées à la fonction d’intermédiation réellement exercée par l’Agence sur le marché du travail et qui l’amène à aller bien au-delà du simple rapprochement entre offres et demandes d’emploi.

 

Ces observations présentées, il convient de formuler un ensemble de remarques plus précises sur les différents développements du chapitre relatif à l’efficacité de l’Agence.

 

Le contexte de l’intervention de l’Agence

S’agissant tout d’abord de l’analyse du contexte, la Cour d’une part, note avec raison une situation de « responsabilité très éclatée » et, d’autre part, met en évidence les « limites du fichier des demandeurs d’emploi ». Dans ce domaine, il apparaît cependant regrettable que n’ait pas été relevé, au-delà des nouvelles relations positives établies avec l’UNEDIC suite au transfert de l’inscription et avec l’AFPA avec la mise en oeuvre d’un « service intégré d’appui au projet professionnel », toute l’importance et les conséquences d’une nouvelle organisation de l’ensemble du SPE au niveau territorial. Il est significatif à cet égard que la place et le rôle des services déconcentrés du Ministère de l’Emploi et de la Solidarité ne soient jamais mentionnés. Pourtant dans le prolongement de la démarche de « globalisation » de nouvelles modalités très positives d’organisation et de fonctionnement de l’action publique au niveau territorial se développent depuis 1998. Cette « nouvelle donne » du SPE est importante pour comprendre l’action de l’Agence et, in fine, évaluer dans un nouveau contexte institutionnel son efficacité.

 

Les observations de la Cour sur les limites du fichier des demandeurs d’emploi reprennent pour l’essentiel le diagnostic réalisé par l’IGAS en 1999 et partagé par l’Agence. Il importe ici de rappeler que l’Agence a largement contribué à l’identification et à l’analyse des principaux dysfonctionnements (mauvaise information sur la disponibilité des demandeurs d’emploi, inadaptation des règles de gestion du fichier, etc ...) et qu’elle est la première intéressée par l’adoption par l’État et les partenaires sociaux de nouvelles dispositions dans ce domaine. L’A.N.P.E. a montré à plusieurs reprises au cours des deux dernières années, qu’aujourd’hui les catégories utilisées ne reflètent plus la réalité opérationnelle. Il lui paraît important de déterminer avec le demandeur d’emploi le service qu’elle va pouvoir lui apporter en fonction de l’objectif visé, de l’emploi-métier recherché, de la réalité du marché du travail, de sa qualification et de sa disponibilité.

  

La stratégie de placement

  

L’Agence se réjouit tout d’abord du constat fait par la Cour qui souligne « l’effort important de modernisation des prestations... aux entreprises et aux demandeurs d’emploi ».

 

De la même façon la Cour montre tout le sens et l’intérêt de la mise en place durant les dernières années d’équipes professionnelles dans les agences locales.

 

En ce qui concerne les résultats enregistrés en direction des entreprises, l’objectif central assigné par les pouvoirs publics à l’Agence était, dans un premier temps, d’obtenir une part de marché de 40 % (orientations du 2ème contrat de progrès) et ensuite de maintenir à un haut niveau (3 000 000) les offres collectées (orientations du 3ème contrat de progrès). Force est de constater que ces objectifs stratégiques ont été atteints par l’établissement. La croissance du recueil des offres d’emploi entre 1992 et 1999 a été de + 150 %. L’observation de la Cour qui indique que « la croissance du volume des offres d’emploi recueillies par l’A.N.P.E. n’a donc pas été proportionnelle à celle des embauches constatées sur le marché du travail au cours de la dernière période » n’apparaît donc en aucune façon fondée puisque entre 1992 et 1999 le volume des embauches n’a pas été multiplié, et il s’en faut de beaucoup, par deux et demi. Le quasi doublement de la part de marché de l’Agence, obtenu dans un marché plus ouvert et très concurrentiel, traduit bien à l’évidence une progression de l’Agence beaucoup plus rapide que celle du marché. Cette évolution permet à l’établissement d’être aujourd’hui dans le peloton de tête des SPE en Europe en matière de positionnement auprès des entreprises.

 

De la même façon, l’observation de la Cour sur la forte baisse des visites en entreprises apparaît inexacte puisque dans la période couverte par l’enquête 1992 - 1999 les visites effectuées par les conseillers sont passées de 372 000 à 394 000. Il convient d’ailleurs de noter que l’intensité de la prospection a été normalement ajustée aux résultats à obtenir. Il paraît en outre préférable à l’Agence, compte tenu des moyens dont elle dispose, de consacrer ses efforts à un meilleur ciblage de la prospection, plutôt que d’accroître tous azimuts le nombre de visites.

 

En ce qui concerne le taux de satisfaction des offres d’emploi, la Cour souligne à juste titre qu’il reste stable et à un niveau élevé (88 %). La baisse du taux de satisfaction par mise en relation positive est en réalité plus apparente que réelle. En effet, cette baisse s’explique par la très forte augmentation des offres nominatives (multipliées par quatre sur la période) pour lesquelles l’Agence ne procède pas directement à des mises en relation. Cette évolution est en parfaite cohérence avec la politique de l’Agence qui favorise par ailleurs l’action en direction des demandeurs d’emploi. Si on retire les offres nominatives, le taux de satisfaction par MER + est aujourd’hui proche de 65 %, ce qui montre l’absence de dégradation dans les résultats de l’Agence en la matière.

 

S’agissant enfin des indices de satisfaction issus des enquêtes d’opinion auprès des employeurs la Cour note un plafonnement ou une légère baisse.

 

En fait trois indicateurs importants mettent plutôt en relief une grande stabilité :

 

« intention de recours aux services de l’ANPE »

1995 : 88,5 %

1999 : 88,1 %

 

« recommanderiez-vous à une entreprise qui recrute de faire appel à l’ANPE ? »

1995 : 84,7 %

1999 : 83,6 %

 

« satisfaction par rapport aux conditions du dépôt de l’offre »

1995 : 81,0 %

1999 : 81,7 %

 

Il convient également de signaler une tendance à une concurrence accrue entre les divers moyens de recrutement.

 

« avez-vous utilisé d’autres moyens ? »

1995 : 62,5 %

1999 : 69,8 %

 

Cette diversification ne s’effectue pas forcément au détriment de la performance de l’Agence :

 

« quel moyen de recrutement considérez-vous le plus efficace ? »

 

pour les emplois qualifiés :

  

 

1995

1999

petites annonces

23,8 %

23,8 %

réseaux de connaissance

30,5 %

25,3 %

ANPE

17,7 %

17,3 %

candidatures spontanées

13,2 %

6,8 %

 

Pour les emplois non-qualifiés :

 

 

1995

1999

réseaux de connaissance

32,2 %

25,6 %

ANPE

22,8 %

23,9 %

petites annonces

18,9 %

16,0 %

candidatures spontanées

17,5 %

12,7 %

 

La Cour pose le problème de la capacité de l’ANPE à assurer simultanément un traitement personnalisé de l’offre et de la demande d’emploi tout en étant confrontée à une gestion de masse. L’objectif stratégique de l’Agence, traduit par son offre de service est bien de concilier ces deux volets, dont la complémentarité est garantie d’efficacité et apporte une réponse appropriée à l’ensemble de ses clients.

 

S’agissant de l’appui aux demandeurs d’emploi, la Cour note dans son rapport l’effort important accompli par l’Agence pour moderniser ses outils et adapter ses prestations. La Cour considère cependant comme surprenante la légère diminution (- 10 %) des entretiens entre 1994 et 1998. A ce propos trois explications s’imposent. Premièrement, au cours des années concernées beaucoup plus d’offres d’emploi sont affichées avec l’adresse de l’employeur et ne génèrent donc plus d’entretien. Deuxièmement, les entretiens proposés sont plus longs (notamment avec le transfert de l’inscription et le premier entretien professionnel). Troisièmement, l’accueil actif généralisé dans les agences locales supprime l’obligation pour les demandeurs d’emploi de passer par un entretien quel que soit le service recherché.

 

La Cour indique qu’en 1998, 400 MF ont été consacrés à la modernisation des prestations de services proposées aux demandeurs. Ces 400 MF ont été utilisés à la réalisation des prestations ; ainsi une nouvelle gamme de services a été mise en place avec une forte augmentation du nombre des bénéficiaires (480 000 en 1998, 616 000 en 1999).

 

Dans le domaine des dispositifs de formation gérés par l’Agence la Cour souligne le manque d’indicateurs de suivi et d’impact. Elle s’étonne également de ne pas voir l’établissement influer, sauf au plan local, sur les décideurs de la commande publique de formation professionnelle. Cette vision ne correspond pas à la réalité. Les informations de pilotage existent. Ainsi pour les SAE 83 % des bénéficiaires sont embauchés à la fin du stage. Pour les SIFE individuels une étude de 1998 montre que 38 % des stagiaires ont occupé un emploi dès la fin du stage. Par ailleurs l’action de l’Agence sur l’orientation de l’offre de formation se concrétise principalement en direction de l’AFPA dans le cadre de la nouvelle organisation du SPE au niveau territorial et avec les conseils régionaux au moment de l’élaboration des plans régionaux de formation (PRF).

 

En ce qui concerne le cas spécifique des publics prioritaires, la Cour observe l’impact positif du travail de l’Agence dans la mise en oeuvre des trois grands programmes prioritaires des années 90. Stabilisation du nombre de chômeurs de longue durée avec « l’opération 900 000 CLD » de 1992, baisse de 9 % du nombre de jeunes CLD avec le programme « 120 000 jeunes chômeurs de longue durée » et baisse importante des CLD avec la mise en oeuvre depuis 1998 du « Service personnalisé pour un nouveau départ vers l’emploi ».

 

La Cour dans la partie terminale de son rapport semble s’interroger sur la part relative de ce qui est imputable à l’action de l’Agence et sur ce qui résulte de la simple amélioration de la conjoncture. A ce stade, il convient de rappeler que les périodes de reprise économique sont généralement génératrices d’un surcroît de sélectivité sur le marché du travail, surtout dans un contexte où le taux de chômage demeure élevé.

 

Dans ce contexte la régression plus rapide du chômage de longue durée (- 32 % pour la DEFM 1 CLD/CVS entre septembre 1998 et septembre 2000 et - 23 % seulement pour l’ensemble de la DEFM) apporte une illustration très concrète de l’efficacité de l’Agence et de sa capacité à atteindre les objectifs qui lui ont été fixés par les pouvoirs publics.

 

Réponse du Président de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA)

 

La période retenue pour votre investigation (1998-1999) vous conduit à constater un certain retard dans la mise en oeuvre opérationnelle du service intégré d’appui au projet professionnel entre l’ANPE et l’AFPA. Depuis, ce retard s’est largement comblé :

- Sur l’année 1999, plus de 90 000 demandeurs d’emploi adressés par l’ANPE, ont bénéficié d’un service d’appui pour l’élaboration de leur projet de formation.

 

- Entre janvier et septembre 2000, ils sont plus de 72 000 à avoir bénéficié de ce service, dont plus de 50% ont une réservation pour entrer en formation à l’AFPA.

 

- Enfin, dans plus de 80% des cas, ce service est assuré par l’AFPA dans les ALE, au contact direct des demandeurs d’emploi.

 

Si des progrès restent encore à faire, quant à l’organisation des collaborations entre l’ANPE et l’AFPA au plan local, les résultats mentionnés ci-dessus, témoignent de l’importance des changements qui s’opèrent aujourd’hui dans les services d’orientation professionnelle de l’AFPA.

 

 

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