1.- AUDITION DE M. GILLES LOFFREDO, DIRECTEUR DE L'ASSOCIATION POUR LA GESTION DES FONDS DE L'ALTERNANCE (AGEFAL) ET DU COMITÉ PARITAIRE DU CONGÉ INDIVIDUEL DE FORMATION (COPACIF)

(Extrait du procès-verbal de la séance du jeudi 1er avril 1999)

Présidence de M. Philippe Auberger, Président

A l'invitation du Président, M. Gilles Loffredo est introduit. Le Président lui rappelle les règles définies par la mission pour la conduite des auditions : pas d'exposé introductif, échange rapide des questions et des réponses. Il donne ensuite la parole, pour une première question, à M. Jacques Barrot, rapporteur spécial de la commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan sur les crédits de la formation professionnelle.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial : Merci, Monsieur Loffredo, de votre venue. Pourriez-vous nous préciser brièvement les statuts juridiques de l'AGEFAL et du COPACIF, la nature juridique des fonds collectés et la fréquence des reversements effectués par les organismes collecteurs agréés ?

La commission des Finances, dont je suis le rapporteur spécial, a essayé à plusieurs reprises de comprendre comment procédaient ces fonds de mutualisation. Comment permettre à l'AGEFAL et au COPACIF d'établir entre les nombreux OPCA une mutualisation efficace ?

M. Gilles Loffredo : Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Madame, Messieurs les députés, il vient d'être rappelé que je dirige deux structures : l'une consacrée à la formation en alternance, l'autre au congé individuel de formation.

Ces deux organismes nationaux sont gérés par des conseils d'administration paritaires avec des présidences alternantes tous les deux ans. Ce ne sont pas deux usines à gaz : l'AGEFAL et le COPACIF réunis ne comptent que dix salariés.

Nous avons la mission de recueillir, au 31 mars pour le CIF, au 30 juin pour l'alternance, les excédents éventuels des OPCA ou des OPACIF, chargés au plan régional ou par branche de collecter les contributions obligatoires des entreprises. Sans doute serons-nous amenés à revenir sur cette mécanique perverse de la contribution, puis de l'engagement, puis du paiement et enfin du décaissement... Actuellement, nous veillons à la remontée des fonds à deux périodes de l'année pour les deux dispositifs. Nous ne les gardons pas, nous les affectons à ces mêmes OPCA afin d'être en mesure de redistribuer la trésorerie nécessaire, en cours d'année, à ceux qui en ont besoin. C'est apparemment simple et infiniment plus complexe dans la réalité.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial : De quelle façon fonctionnent en amont les OPCA ? Une double collecte régionale et de branche ne va pas sans problème ; certaines branches sont très petites. L'organisation économique nationale par branche soulève des difficultés et des tensions très fortes se font jour entre une collecte territoriale et par branche.

M. Gilles Loffredo : Un OPCA a pour mission statutaire de collecter, soit au titre du plan de formation, soit pour l'alternance, soit pour le congé individuel, les contributions des entreprises dues au 28 février de chaque année. Les OPCA viennent donc d'achever une collecte, dont les grandes masses avoisinaient, en 1998, pour l'alternance, 6,5 milliards de francs et pour le congé individuel, 3 milliards de francs. Les OPCA, territorialement ou par branche nationale, selon le secteur dont relèvent les entreprises, ont une vie avant la collecte. Dès lors, son produit est affecté à la prise en charge de contrats. En effet, un certain temps s'écoule entre le moment de la collecte et celui où l'OPCA " décaisse ", parce que la formation ne commence pas de suite, qu'elle court sur deux exercices, voire plus, et que l'OPCA estime qu'à compter du moment où il a pris un engagement, il ne dispose plus de cette somme. Cependant, sur la durée, il est amené à collecter à nouveau. Le système, donc, obligatoirement, génère des disponibilités excédentaires, même s'il existe des disparités fortes entre les organismes qui n'ont pas besoin du fonds de mutualisation - la métallurgie par exemple qui collecte, mais qui ne recourt pas aux fonds de l'AGEFAL - et ceux qui en ont grand besoin, à savoir les branches à faible contribution, tel le secteur de l'artisanat où la collecte est faible. MULTIFAF, par exemple, collecte pour les coiffeurs, taxis, fleuristes, quinze millions de francs dans l'année et compte à l'AGEFAL une garantie de 260 millions de francs, car les contrats de qualification sont très nombreux dans ce secteur. Que faut-il faire ? Notre rôle est bien, à partir des excédents qui remontent des OPCA, d'affecter à l'artisanat l'argent dont il a besoin.

M. Philippe Auberger, co-président : Le document qui nous a été distribué, et qui date de mars 1999, souligne l'effort des entreprises à partir des données 1996. Les dépenses des OPCA sont évaluées à 17 milliards de francs, dont :

- plan de formation : 7 milliards de francs ;

- alternance : 5,7 milliards de francs ;

- CIF : 4 milliards de francs.

Ces chiffres ne correspondent pas à vos données.

M. Gilles Loffredo : L'AGEFAL ne suit que l'alternance et le COPACIF le congé individuel de formation. Mes chiffres n'incluent pas les plans de formation, domaine sur lequel je n'exerce aucune responsabilité.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial : En termes de cotisations, on note : 0,4 % pour l'AGEFAL, 0,9 % pour le plan de formation. Quel est l'organisme qui assure la mutualisation du plan de formation ?

M. Gilles Loffredo : Il n'y en a pas.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial : Le pourcentage du CIF est fixé à 0,2 %.

M. Gilles Loffredo : Ce dernier pourcentage s'applique en effet, sauf mise en _uvre du capital de temps de formation, à 0,1 % prélevé sur cette contribution. M. Jacques Barrot, rapporteur spécial : En d'autres termes, vous vous occupez du 0,4 % et du 0,2 %, si je puis dire.

M. Gilles Loffredo : J'aurais dû le préciser d'entrée.

Un OPCA gère un flux qui complique infiniment la lecture et la compréhension de nos organismes. Elle est très difficile pour vous, elle l'est souvent aussi pour nous.

Nous avons deux approches différentes. Celle de l'administration et des pouvoirs publics a sa logique ; elle raisonne annuellement : pour un exercice donné, l'on acquiert une vision particulière. À cette vision, les partenaires opposent ou juxtaposent la leur, fondée sur l'idée qu'un OPCA ne naît pas au moment de la collecte, mais est lié, dans le temps, par les fonds qu'il reçoit et affecte. Si le dispositif s'arrêtait demain matin, l'OPCA serait tenu d'honorer les engagements pris. Cette lecture historique fait prendre en compte la totalité d'un cycle.

Je vous accorde que nous n'avons pas la culture de la lecture et de l'analyse par exercice. Nous nous y efforçons. Mais l'on pratique plus par recherche : pourquoi de l'argent stationne-t-il dans les OPCA ? Pourquoi certains autres en manquent-ils ? Certes, il ne faut pas perdre de vue la diversité des branches économiques : on ne peut analyser le secteur des coiffeurs comme celui des consultants et quelle que soit la pertinence d'une réglementation, jamais ces deux secteurs ne se ressembleront. Or, nous sommes tenus d'appliquer des règles nationales de lisibilité et de régulation, peu compatibles, pour une grande partie, avec la diversité des secteurs.

Dans ce cycle pervers générant dans l'opinion ce que Jacques Delors appelle « la défiance diffuse » envers la formation professionnelle, nous avons un devoir citoyen d'essayer de mieux expliquer ce qui se passe ou de faire en sorte que cela se passe mieux. Doit-on obliger les OPCA à raisonner en trésorerie annuellement et à ne plus raisonner en engagements pluriannuels ? Les pouvoirs publics peuvent nous demander de contribuer exceptionnellement à la loi de finances, sous prétexte que nous disposerions de trésorerie en cours d'année ! Il est vrai que cette trésorerie existe, mais elle est juridiquement liée par l'affectation que nous lui avons donnée.

M. Jean-Jacques Jegou : Nous sommes là pour aborder les vrais sujets. Celui qui est responsable des crédits qui vous ont été « piqués », c'est moi ! Soyons clairs.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial : J'ai eu à m'insurger, car j'ai dû me battre contre le ministère des Finances qui a voulu enlever au ministère des Affaires sociales les sommes que le Parlement avait dégagées. Là, j'ai protesté.

M. Jean-Jacques Jegou : L'intention du rapporteur spécial de l'époque était d'abord d'établir - j'ai mis deux ans - le niveau de l'excédent. On nous racontait des histoires et l'on nous prenait pour plus idiots que nous sommes. Le parlementaire moyen est capable de déduire que la présence de produits financiers atteste d'une trésorerie ! Certaines années, l'on a dépassé le milliard de francs de produits financiers, soit une trésorerie qui évolue entre douze et quatorze milliards.

Au-delà du prélèvement - geste bête et méchant, j'en conviens -, restait la question de l'utilité de fonds importants. Ne discutons pas de la question de la comptabilité, mais subsiste-t-il encore un problème d'excédent de trésorerie et une gestion qui s'apparente à de la thésaurisation ? Que pouvez-vous dire aujourd'hui, après la remise en ordre à laquelle le Parlement a procédé ?

M. Philippe Auberger, co-président : Je me permets de compléter la question. Nous avons tous sous les yeux un document de 1997 intitulé « Ressources et dépenses », où l'on retrouve deux notions, aussi bien pour l'alternance que pour les CIF.

Pour l'alternance il est écrit : « provisions et autres : 8,9 % ». Si je comprends bien, l'on couvre l'ensemble des contrats passés. Est-il normal de le faire à hauteur de 100 %, ce qui n'est pas le cas de secteurs où des risques réels se posent ? Pour le CIF, le taux des provisions à hauteur est de 17,5 %. Pour l'alternance, on découvre une rubrique « Excédents » avec 15,7 %. Quinze pour cent de 6,4 milliards représentent environ 900 millions de francs.

Pouvez-vous expliquer ces chiffres ?

M. Gilles Loffredo : J'ai été très sensible à l'intervention de M. Jegou. Je pensais m'être exprimé de façon directe.

Je résume les questions par la formule suivante : quid des excédents après la régulation intervenue en 1996 pour le congé individuel de formation et celle plus ancienne et permanente pour l'alternance ?

Je réponds de façon très directe. Nous avons, pour la première fois, mis en place un dispositif de collecte de l'excédent du CIF en 1996. Le recul historique n'est pas important, mais il est suffisant pour apprécier la réalité. Nous avons alors recueilli en 1996 3,035 milliards de francs. On « nettoyait » ainsi toute une histoire.

Le COPACIF a reversé une contribution exceptionnelle au budget de l'État presque concomitamment et nous avons reversé aux branches ce qui leur revenait, du fait de la mise en oeuvre du capital de temps de formation, calculé selon une méthode de proratisation. En clair, et pour ne pas multiplier les chiffres qui ne sont souvent qu'une façon d'égarer, le fonds de péréquation a démarré au 1er janvier 1997, avec 990 millions de francs, déduction faite des reversements à l'État et aux branches. Nous avons, à la date d'hier, versé à tous les FONGECIF les sommes nécessaires à leur fonctionnement et il nous « reste », si je puis dire, 197 millions de francs.

Sur deux ans nous avons essayé de lisser, en vérifiant la politique d'engagement de chaque FONGECIF. Nous pourrions nous satisfaire de cette relative régulation. Depuis 1996, nous n'avons plus recueilli d'excédent. C'est là un élément de nature à rassurer à la fois un élu de la Nation et un gestionnaire de fonds. Nous ne recueillons plus d'excédents significatifs. Le fusil a tiré un coup en 1996 - un gros coup. Comme les saignées de Molière, c'est la première qui rapporte ! Aujourd'hui, nous sommes sur la voie d'une régulation totale, mais sur la base d'un dossier accepté sur deux - des parlementaires m'écrivent au sujet de dossiers de prise en charge refusés par les FONGECIF. La fin des excédents et une trésorerie de 197 millions de francs, sur une collecte de trois milliards, en caisse au COPACIF ne permettent pas de réengager une politique. Nous répondons au coup par coup à des besoins de trésorerie de 43 organismes. Je ne peux pas leur dire d'engager plus, le niveau de la réserve ne permettant pas un surengagement.

Sur l'alternance, les volumes sont beaucoup plus importants. Le dispositif en 1995, 1996, et même en 1997 encore, a été faible : la mise en oeuvre de mesures d'alternance ne se décrète pas. Un congé individuel se décrète dans la tête d'un salarié ; ensuite, on gère une file d'attente. Nous avons cofinancé des campagnes de développement de l'alternance.

Nous avons compté 100.000 contrats de qualification en 1997, 115.000 en 1998 et nous en espérons 130.000 en 1999, adultes compris. Il est vrai que chaque année 6,5 milliards tombent avec une activité qui met deux ou trois ans à démarrer. Moralité : la contribution exceptionnelle au budget de l'État au titre de l'alternance s'est élevée à 1.380 milliards de francs en 1997 et il a été, pour 1998, inscrit forfaitairement dans la loi de finances à hauteur de 500 millions de francs. Aujourd'hui, vous le savez, Mme Aubry et Mme Péry ont signalé à l'AGEFAL la décision d'un prélèvement de 500 millions de francs sur sa trésorerie courant 1999. Nous avons constaté un niveau élevé d'excédents en 1997 et 1998. Pour cette année le chiffre, vient d'être estimé.

M. Francis Delattre : Les autres chiffres ne sont pas sortis, celui-là oui !

M. Gilles Loffredo : Au 30 juin, l'AGEFAL ne recueillera pas 1,4 milliard de francs d'excédent comme elle l'a fait pendant deux ans, mais seulement 600 millions de francs.

M. Philippe Auberger, co-président : Est-il légitime de provisionner à 100 % ? Si j'ai bien compris, vous déterminez vos excédents une fois vos actions provisionnées à 100 %. Un texte ne permettrait-il pas de mieux régler la question ?

M. Gilles Loffredo : Avant de répondre, j'achève très brièvement le point précédent.

Alors que le niveau de l'excédent a sensiblement diminué par rapport à l'an dernier - c'est tant mieux, l'AGEFAL n'a pas vocation à accumuler, au sommet, un flux financier trop important -, la demande que nous présentent les OPCA traduit la prolongation dans leurs projets 1999 à partir de l'activité 1998, soit 2,5 milliards de francs en couverture d'engagements. Nous n'avons pu accorder hier, en engagements, que 1,7 milliard de francs. Nous avons certes procédé à des abattements. Il n'est pas question de prendre pour argent comptant la demande des OPCA. On vérifie le coût moyen des contrats et si l'activité est plausible par rapport à celle enregistrée en 1998. Ainsi, nous étêtons ces demandes et les rendons vraisemblables. Malgré tout, nous ne pouvons y répondre complètement.

Enfin, l'AGEFAL a terminé - cela est certifié par le commissaire aux comptes, et aucune décision ne se prend sans l'avis du commissaire du Gouvernement qui siège dans nos instances - l'exercice 1998 avec une insuffisance de couverture de 300 millions de francs. Aujourd'hui, si tout s'arrêtait, l'AGEFAL serait en découvert de 300 millions pour couvrir les OPCA - hypothèse d'école. Au 31 décembre 1999, compte tenu d'une remontée sensiblement diminuée des excédents, mais aussi compte tenu de l'activité prévisionnelle 1999 qui est forte, l'insuffisance de couverture de l'AGEFAL sera de l'ordre d'1,2 milliard. La couverture est insuffisante par rapport à l'activité des OPCA, mais il y aura, en trésorerie, sept ou huit cents millions en trésorerie.

Nous devons demander à notre commissaire aux comptes et au commissaire du Gouvernement de constater que nous sommes à moins trois cents millions en 1998 et que nous serons, au terme de l'exercice 1999, à moins 1,2 milliard de francs.

M. Jean-Jacques Jegou : Vos propos sont importants pour comprendre vos problèmes de couverture des engagements et de trésorerie. Mais avez-vous établi un pourcentage d'abandon annuel des formations ? Il nous faut aller au bout de la question afin d'aborder ensuite la pertinence des formations.

Que représentent ces abandons pour votre budget ?

M. Philippe Auberger, co-président : Tenez-vous compte de ces abandons pour établir vos provisions ?

M. Gilles Loffredo : La moyenne nationale d'abandons, toutes raisons confondues, s'élève à 15 % pour l'alternance et de 9 % pour le congé individuel de formation ; cette faiblesse s'explique dans le cadre du congé par l'existence d'un fort projet personnel lié à ce type de mesure.

M. Jean-Jacques Jegou : On finit par se mettre d'accord !

M. Gilles Loffredo : Fallait-il encore qu'on me pose la question !

Je me permets de vous suggérer de vous rapprocher des services du ministère de l'Emploi et de la Solidarité, notamment auprès du Groupe national de contrôle.

M. Jean-Jacques Jegou : Je ne suis pas sûr que cela soit le meilleur endroit.

M. Gilles Loffredo : Cette remarque vous appartient.

M. Francis Delattre : Il faut avoir été au moins trois ou quatre fois ministre pour comprendre.

M. Gilles Loffredo : J'ai encore du chemin à parcourir !

Je donnais donc, en réponse aux questions, des chiffres moyens qui, naturellement, cachent des disparités très fortes. Ainsi, l'OPCA du secteur des consultants n'enregistre pas plus de 4 % d'abandons, Le secteur de l'hôtellerie-restauration 38 %. Il convient de prendre garde aux chiffres moyens qui, surtout pour l'alternance, recouvrent de grandes disparités.

Que faire ? Nous essayons, avec un grand souci de transparence, d'obtenir une accélération dans le flux des finances de la formation professionnelle. Il faut acquérir une vision biologique et non comptable ou réglementaire du circuit de la formation professionnelle. Comment empêcher que l'argent stationne, comment supprimer les engorgements, à des moments donnés ?

Sur des actions qui, par définition, excèdent un exercice, comment, pour un OPCA, s'engager sur une seule année ? Renvoyer la fin de l'engagement à plus tard reste possible, mais constituerait, à n'en pas douter, un élément de dissuasion forte pour les entreprises. N'oublions pas la rigidité qui pourrait résulter d'une lecture de l'annualité budgétaire. Mais, nous ne sommes pas totalement performants dans le suivi régulier des engagements. Certaines structures le sont, car elles sont équipées pour cela ; elles ont, dans la limite des frais de gestion, dégagé les moyens nécessaires à ce suivi. D'autres sont manifestement handicapées pour y procéder. Nous n'avons pas, de ce point de vue, une maîtrise totale et régulière du nettoyage des engagements morts. Les OPCA sont à cet égard invités à plus de rigueur par l'AGEFAL.

Je dois préciser que, statutairement, ni l'AGEFAL ni le COPACIF ne sont chargés d'une mission de contrôle. Nous ne sommes pas en position hiérarchique et chaque OPCA est agréé par le ministre de l'Emploi et de la Solidarité. Nous n'avons qu'un rôle de tête de réseau et de consolidation. Je ne peux rien prescrire à mes collègues directeurs, je les invite. Heureusement, les relations interpersonnelles à tous niveaux suppléent la réalité que je décris.

M. Philippe Auberger, co-président : Il n'existe pas de cadre comptable et financier réglementaire qui permette de cadrer mieux.

M. Gilles Loffredo : Le plan comptable de 1993 adapté pour les organismes collecteurs est en vigueur et nous-mêmes ne calculons pas les excédents à notre gré et selon nos caprices, mais en fonction de décrets qui réglementent le calcul des disponibilités excédentaires. Un texte est consacré à l'alternance, un autre au CIF et j'espère pour demain...

M. Francis Delattre : Pas pour la gestion des abandons.

M. Gilles Loffredo : Effectivement. J'espère, pour les réformes à venir sur les temps de formation, sur le capital temps formation, que l'on saisisse cette occasion pour mettre à plat les dispositifs comptables et que l'on aboutisse à un calcul d'excédent unique à la même date.

Le noeud du progrès réside en effet dans le suivi et la maîtrise des engagements.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial : Prenons l'exemple d'un OPCA d'une petite branche dépourvue d'échelon régional, qui reçoit des fonds, les stocke et s'avère incapable de les dépenser, faute d'implantation locale. On a le sentiment que des OPCA nationaux continuent à collecter tout en sachant pertinemment qu'ils ne placeront pas de contrats de qualification ou d'apprentissage. Dispose-t-on, dans ce cas, du moyen de réprimander une telle pratique, dans la mesure où l'on a la quasi-certitude que l'argent collecté ne pourra être engagé et viendra grossir provisoirement les excédents ?

M. Gilles Loffredo : Dans le cadre de la réglementation, il nous est très difficile de procéder autrement que selon nos pratiques actuelles, à savoir constater une insuffisance d'activité ou une suractivité et en déduire que cela génère des excédents. Rien de plus. Nous n'avons pas de mission de contrôle, sauf sur la comptabilité des OPCA.

Je ne peux que déplorer la faiblesse du dispositif de contrôle de la formation professionnelle. Sans vouloir verser dans le travers d'un jacobinisme exacerbé, je crois que le dispositif national de contrôle est faible.

Quand j'indique à un responsable d'OPCA qu'il a peut-être raison aujourd'hui, mais que son dispositif lui donnera tort à terme, il me répond : « Prouvez-le moi ! Je respecte les textes, si je ne les respecte pas, que l'on me sanctionne ! »

M. Philippe Auberger, co-président : La venue de la Cour des comptes chez vous ne serait pas pour vous effrayer ?

M. Gilles Loffredo : En aucune façon. Le directeur de l'organisme ne la redoute pas, le citoyen s'y prépare.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial : Pour revenir à la question de Philippe Auberger, ne conviendrait-il pas de réfléchir au lissage des engagements - je n'avais pas trouvé la solution quand j'étais au ministère - pour éviter cette reconstitution d'excédents temporaires ? Il est vrai que ce n'est guère aisé, nous avons à faire au vivant.

Il en va de même en matière de sécurité sociale où il est également extrêmement difficile de provisionner. Nous ne pouvons pas transférer, dans la dépense sociale comme dans la dépense de formation professionnelle, des procédures propres à la dépense d'État. Tout dépendra de l'appétit que manifesteront les entreprises pour recourir à la formation ou à l'apprentissage. C'est vrai que beaucoup sont placées sous l'aléa de la conjoncture, mais il faut nous efforcer de resserrer le pilotage, afin d'éviter ce qui peut apparaître scandaleux : des besoins d'argent ici, des excédents là.

M. Francis Delattre : On évoque beaucoup les problèmes financiers, mais contrôle-t-on à un moment donné la pertinence des moyens utilisés ?

M. Philippe Auberger, co-président : Nous reviendrons sur ce point.

Existe-t-il une réglementation sur les OPCA ? Que font les OPCA de leurs provisions, les placent-ils sur des comptes à terme ? Certains disposent de sommes relativement élevées, jouissent de revenus financiers. Comment cela est-il réglementé, quel est le mode de contrôle ?

M. Gilles Loffredo : Le plan comptable décrit suffisamment ce qu'est une provision, ce qu'il faut inscrire comme tel à la fin d'un exercice, à propos de charges qui sont à payer immédiatement après. Mais, comme tout texte, il laisse place à des interprétations qui permettent des lectures un peu laxistes, je n'en disconviens pas. Cela correspond à une définition réglementaire et comptable. Naturellement, il y a placement. J'indiquais tout à l'heure que les deux collectes CIF et alternance - comme il en va de toute collecte -, provoquent des pics de trésorerie, puisqu'elles sont opérées une fois dans l'année. Il n'y est pas procédé de façon fractionnée, excepté dans certains secteurs professionnels bien déterminés. Mais, globalement, il s'agit d'une collecte unique annuelle. Un placement s'impose donc, dont les produits sont un peu plus faibles que les années précédentes, ce qui est tout à fait normal, et qui sont obligatoirement réinvestis dans le disponible de l'organisme. Il en est ainsi des 68 OPCA agréés au titre de l'alternance et des 43 agréés au titre du congé individuel de formation.

Je crois donc que les règles existent. J'hésite à entrer dans le débat suscité par la question de M. le Ministre Jacques Barrot sur la nation, la région, la branche et l'interprofessionnel régional, car je crois que cela excède mon mandat administratif. Le problème politique de fond est de déterminer si les conséquences de la loi quinquennale de 1993 ont suffisamment éclairci le paysage de la collecte et je serais tenté de répondre, à la suite de M. Barrot, que nous sommes au milieu du gué, que nous n'avons pas encore soldé les acquis de la loi quinquennale, qu'émerge un besoin de remise à plat du dispositif encore trop compliqué et peu lisible.

Ma réponse à M. Barrot se limite à constater que, cette année, les excédents baissent : 200 millions de francs pour le CIF - et encore est-ce là l'historique, je ne recueille rien cette année - et 600 millions de francs pour l'alternance. Je vous accorde que c'est beaucoup, mais nous partions de 1,4 milliard de francs. J'ai tendance à dire, étant optimiste, que les excédents se régulent, lentement mais sûrement, à la baisse. Une explosion de l'activité alternance serait la seule chose qui pourrait nous placer en difficulté. Or, tel n'est pas le cas actuellement, puisque, si les contrats de qualification ont grimpé à nouveau au cours du dernier trimestre 1998, ils se sont tassés au premier trimestre 1999.

Imaginons qu'au 1er janvier, une branche m'annonce : "Les contrats de qualification "adultes" m'intéressent et j'en prévois 8988." Bravo pour la prévision ! Puis-je répondre à cet organisme : « Désolé, la barre est placée trop haut, vous ne les ferez pas » ? Non, je suis obligé d'intégrer cette prévision d'activité dans sa couverture 1999. En effet, imaginez qu'il la réalise ! C'est là toute la difficulté entre prévision et réalisation. Même si nous procédons à un suivi mensuel, nous sommes gênés par cette appréciation d'écart entre le provisionnel et le réalisé.

Cela dit, qu'est-ce qu'un fonds de péréquation ? Si l'on considère qu'un fonds de péréquation doit être à trésorerie zéro - objectif possible -, l'on ne réalise plus de péréquation.

M. Philippe Auberger, co-président : Je pense que l'on a fait le tour de la question et je suggère que l'on passe à l'utilisation des fonds.

M. Jean-Jacques Jegou : Si j'avais eu quelque insomnie depuis que j'avais fait effectuer par l'Assemblée ce prélèvement, aujourd'hui les explications entendues me rassureraient complètement. Vous avez en effet, sans le dire, montré que la démarche n'était pas absurde.

Êtes-vous - AGEFAL et COPACIF - propriétaires fonciers ? Considérez-vous fondée la révision du niveau des cotisations des employeurs - avec tout ce qui a été dit et reste à dire - et qui recouvrait le deuxième volet de la volonté du rapporteur spécial que je fus pendant quatre ans ?

M. Gilles Loffredo : Ce sont là deux questions d'inégale difficulté. Ni l'AGEFAL ni le COPACIF ne sont propriétaires. Notre local du 103, boulevard Haussmann est loué aux Mutuelles du Mans. Je sais que cela n'est pas forcément le cas de tous les OPCA.

La seconde question est infiniment plus complexe et vous m'accorderez qu'elle dépasse la responsabilité d'un directeur général qui met en _uvre un dispositif sous l'égide des partenaires sociaux. Je signale, sans vouloir botter en touche, qu'il existe un comité paritaire national de la formation professionnelle qui n'a pas d'existence juridique, mais politique, et qui pilote les orientations dont l'AGEFAL et le COPACIF sont les bras séculiers.

Je ne souhaite pas tirer de conclusions hâtives des grands flux financiers que nous avons décrits. J'imagine qu'il s'agit d'un sujet qui intéresse au premier chef les confédérations, tant d'employeurs que de salariés, et qui est débattu ailleurs dans nos instances techniques.

M. Raymond Douyère : D'autres organismes que le vôtre sont propriétaires. Quelle est la valeur consolidée des patrimoines ?

M. Gilles Loffredo : Je ne l'ai pas en tête, mais j'imagine qu'elle peut être totalisée et que le directeur du groupe national de contrôle de la formation professionnelle dispose des moyens de vous informer.

M. Raymond Douyère : Ces patrimoines servent-ils à l'organisme ou à des placements financiers ?

M. Gilles Loffredo : Je me plaçais dans l'hypothèse où, pour des raisons de calcul économique, l'organisme préfère acheter pour son propre usage. Je m'interdis d'imaginer qu'il pourrait y avoir d'autres destinations.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial : Vos attributions, monsieur Loffredo, concernent davantage les recettes, mais portent toutefois un double regard sur l'alternance et sur les congés individuels de formation. Sur ces deux secteurs, avez-vous le sentiment d'une bonne utilisation des moyens ? L'effort demandé aux entreprises est-il proportionné à la demande ? L'intérêt de cette audition est de nous montrer que, au-delà des grands fonds de mutualisation et de péréquation, il existe des OPCA exemplaires et d'autres qui le sont beaucoup moins.

M. Gilles Loffredo : L'alternance est un dispositif régulé par des règles relativement précises, beaucoup plus que dans le cas du congé individuel de formation - cela se comprend. Je n'ai pas le sentiment d'une utilisation inadaptée de la collecte par rapport aux objectifs, tant pour la qualification que pour l'orientation.

On peut s'interroger davantage, en revanche, sur l'encadrement et le suivi du jeune en contrat de qualification dans l'entreprise, sur le tutorat ou les variantes que l'on peut en connaître. Je ne suis pas certain, diversité oblige, que, selon les branches ou les régions, nous soyons partout près de la perfection. Ce point me paraît plus délicat que celui de la nature de la formation dispensée. L'insertion profonde du jeune dans l'entreprise n'est pas facile à réaliser.

L'histoire et la raison d'être du congé individuel de formation, qui place l'individu au coeur du dispositif, conduisent à des situations très diverses. Je rappelle tout ce qui s'est dit, écrit et constaté au cours des années 80 sur les dérives d'un dispositif alors récent. Nous étions encore en période de vaches ni maigres ni folles, mais plutôt grasses, et les fonds des premières collectes ont pu être affectés à des projets très personnels dont le bénéfice économique et social n'était pas avéré, sauf pour la personne. Les choses ont évolué avec la conjoncture, mais aussi par le jeu des organismes paritaires qui ont été conduits à plus de responsabilité dans leurs priorités de prise en charge. Aujourd'hui, la part de congés individuels de formation est très forte, de l'ordre de 32 %, en ce qui concerne de bas niveaux de qualification. Nous constatons une montée de cette catégorie dans le nombre, pas forcément dans le volume financier.

Par ailleurs, le dispositif est encore peu féminisé : 68 % des bénéficiaires sont des hommes. C'est un dispositif qui peut être considéré comme cher et lourd. Le coût moyen d'un congé s'élève à 120.000 francs. Nous avons pris en charge des formations de plus en plus longues et qualifiantes ; ce n'est pas malsain, mais cela représente un coût. Il est vrai que la collecte se monte à 3 milliards de francs et concerne 30.000 bénéficiaires. Soit l'on considère que c'est très cher, soit l'on avance qu'il s'agit d'une anticipation de parcours individuel et l'anticipation éventuelle d'un non-emploi !

Aujourd'hui, aucun congé individuel, ou presque, n'est déconnecté de la vie de l'entreprise ou du marché économique, qu'il s'agisse de progresser dans le secteur ou qu'il s'agisse de changer de secteur, de région, de vie ! Réaliser enfin, à la quarantaine, le projet professionnel que l'on n'a pu réaliser à l'adolescence, grâce à des fonds mutualisés, signifie tout de même quelque chose ! Même si l'on ne compte que 30.000 bénéficiaires, ce n'est pas neutre en termes de dispositif social. Pour l'heure, l'on retient un dossier sur deux ; si l'on veut revenir à deux dossiers sur trois comme c'était le cas il y a trois ou quatre ans, il faut réformer les dispositifs, notamment faire en sorte que la formation puisse être réalisée pour partie en dehors du temps de travail. Le coût d'un congé individuel de formation, 120.000 francs, est constitué à hauteur de 75 % par le remboursement de la rémunération. Cela revêt une signification. Doit-on s'en satisfaire ? Est-ce une bonne chose ? Doit-on le corriger ?

Pour répondre à M. Barrot, l'on compte aujourd'hui moins de cas baroques et exotiques dans les congés individuels de formation. Je vous prie de croire que les salariés qui formulent une demande construisent quelque chose. Ils ne viennent pas seulement parce qu'ils se sentent mal dans leur entreprise, ils sont animés du désir de s'en sortir. Ils anticipent une crise. Ils savent qu'ils ne resteront pas cinq ans dans le même emploi. Une telle démarche a un coût, mais aussi une certaine valeur !

M. Daniel Feurtet : Pour réussir la formation professionnelle, que pensez-vous de l'utilisation des préretraites en tutorat ?

M. Gilles Loffredo : C'est une piste à creuser, notamment par rapport à des secteurs ou des entreprises qui ne sont pas en mesure d'assurer cette mission.

M. Jean-Jacques Jegou : Je ne suis pas sûr que, dans le cadre de la mission nous soyons amenés à nous exprimer sur ce que nous pensons du CIF. Cependant, avec la nécessité de changer de métier, il faudrait que nous revoyions à la fois le problème de la cotisation et l'analyse de la pertinence des projets afin de distinguer celui qui a simplement envie de changer radicalement de celui qui y est contraint par la perspective d'un licenciement. À ces derniers, il faudrait donner la préférence.

Néanmoins, je suis sensible à vos propos sur les qualités inégales, sur les contrats de qualification, sur les organismes de formation... Vous confirmez qu'il n'existe pas de prise de position de vos organismes sur la qualité et le devenir des dispositifs. Certains contrats de qualification se passent bien, ceux que l'entreprise prend efficacement en charge et dont elle conserve ensuite le titulaire. Malheureusement, ce n'est pas la majorité. Souvent, le contrat de qualification s'interrompt en cours de route du fait de l'entreprise ou du jeune qui n'est plus motivé. Peut-on, pour justifier la dépense des deniers publics ou des prélèvements aux entreprises, essayer la mise en place de dispositifs qui améliorent les pourcentages de bonne fin de l'utilisation des crédits des entreprises ?

M. Philippe Auberger, co-président : A votre connaissance, certains OPCA disposent-ils d'un système d'évaluation a posteriori des contrats d'alternance comme de congés individuels ?

M. Gilles Loffredo : Ces questions très importantes me permettent d'avancer qu'il est sans doute temps d'aborder les dispositifs de formation sous l'angle de la qualité, de l'efficacité et non sous celui des seuls modes de financement. Aucune réflexion en profondeur n'est engagée sur l'approche qualité - je parle sous le contrôle du commissaire du Gouvernement ici présent ; cela n'entre pas dans les missions de nos structures, structures techniques qui veillent à la régularité d'un dispositif qui reçoit, affecte et reverse de l'argent et qui n'a pas de mission réellement qualitative. En revanche, le Comité paritaire national de la formation professionnelle que je citais tout à l'heure, le CPNFP, est tout à fait à même de diligenter cette réflexion en son sein et en interrogeant ses représentants dans les OPCA. Il en est de même, naturellement, de chaque confédération de salariés ou d'employeurs.

L'urgence d'une réflexion sur la qualité est claire, mais je crois pouvoir dire, sans m'avancer à l'excès, qu'elle ne se fera pas dans nos structures techniques. Il faut imaginer qu'elle puisse se développer dans un autre cadre, plus politique. Elle bénéficierait de l'appui de l'AGEFAL et du COPACIF, qui disposent d'une mine d'informations comme toute tête de réseau, mais la mission politique doit être assurée ailleurs.

M. Jean-Jacques Jegou : Vous êtes ceux qui facilitent, vous financez et recevez la facture.

M. Gilles Loffredo : De qui ?

M. Jean-Jacques Jegou : « Recevoir la facture » est une expression. C'est vous qui débloquez les fonds, qui déliez la bourse.

M. Gilles Loffredo : Sur des besoins de trésorerie dûment constatés et certifiés par des organismes en vérifiant le respect des procédures, mais jamais cela ne porte sur l'appréciation du contrat.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial : L'appréciation de la demande est le fait de l'OPCA.

La vraie question est de savoir si nous pouvons confier aux organismes de péréquation une mission de ce type qui ne leur a pas été donnée par la loi quinquennale.

M. Philippe Auberger, co-président : Aucun OPCA ne pratique spontanément ce contrôle ?

M. Gilles Loffredo : Nous avons une indication sur le suivi du contrat de qualification à 3 et 6 mois et une indication sur le suivi du CIF à 6 mois et à un an. Cette indication est très faible et non totalement satisfaisante. Il faudrait imaginer un dispositif contractuel assez contraignant entre l'OPCA et son bénéficiaire sur son engagement à offrir le poste à la fin du contrat. Mais le bénéficiaire du CIF peut souhaiter changer de région ou d'activité.

Nous n'avons pas le moyen juridique d'obliger quelqu'un à répondre à un questionnaire que nous envoyons six mois après. Certains OPCA le font ; le taux de réponse est de 25 %. Comment obliger un salarié à répondre à un organisme qui a financé un an auparavant ?

M. Jean-Jacques Jegou : La question, à mon sens, ne serait pas « Êtes-vous encore dans la même entreprise ? » mais « La formation dont vous avez bénéficié vous a-t-elle conduit à retrouver un emploi ? » La liberté à laquelle nous sommes tous attachés permet à chacun de travailler où il veut. La question sera abordée aussi avec l'AFPA dont les résultats sont désespérants. Vous évoquez une insuffisance d'information ; pour l'AFPA, c'est une insuffisance de résultats !

Vous semblez avancer un pourcentage extrêmement faible de pertinence de votre action.

M. Gilles Loffredo : Sans doute me suis-je mal exprimé et avons-nous involontairement confondu plusieurs choses. En ce qui concerne le CIF, nous avons affaire à des salariés qui restent salariés. Dès lors, le critère est bien le changement d'activité ou d'entreprise.

Pour l'alternance, nous relevons des insuffisances de mesures par rapport à l'accès à l'emploi qui peut être différé par rapport aux mesures. Mais nous avons, en revanche, une lecture plus précise sur les bénéficiaires qui atteignent le niveau de qualification souhaité : soixante-quinze pour cent atteignent le niveau prévu par le contrat. Que fait le jeune de sa qualification ? Où est-il ? A-t-il trouvé un emploi correspondant à l'investissement collectif de la nation ? Nous souffrons sur ce point d'un déficit.

M. Philippe Auberger, co-président : Une OPCA a-t-elle, en ce domaine, progressé plus que les autres ?

M. Gilles Loffredo : En ce qui concerne l'alternance, l'AGEFAL ne dispose pas d'indications approfondies de la part des collecteurs interprofessionnels régionaux. L'approche « qualité » n'est pas opérée à ce niveau-là. Les OPCA de branche, par définition, disposent de meilleurs outils méthodologiques pour apprécier les parcours. Ainsi, toutes les grandes branches ont-elles une bonne lecture des contrats de qualification pris en compte et du cheminement du jeune qui en a bénéficié. Je pense à la métallurgie, au bâtiment à l'agroalimentaire... Mais, à côté, certains OPCA ne sont pas en mesure de répondre à ce type de question. Et nous, en bout de chaîne, encore moins. Cette mission ne relève pas de nos compétences.

M. Philippe Auberger, co-président : Monsieur Loffredo, je vous remercie de vos réponses.

 

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