Les travaux de la Mission d'évaluation et de contrôle se sont progressivement orientées autour de la problématique de l'amélioration du ratio coût/efficacité du système de formation professionnelle français. Cette efficience augmentée passe par :
· l'élaboration d'une stratégie de rigueur et de long terme pour l'AFPA ;
· le renforcement du contrôle, particulièrement en ce qui concerne la collecte des fonds prélevés sur les entreprises ;
· en matière de qualité des formations dispensées, une place déterminante laissée au contrôle social.
1.- DÉPASSER LA QUESTION STATUTAIRE
Une fusion avec l'ANPE pourrait dégager des économies d'échelle. Il semble cependant nécessaire de dépasser la question du statut particulier de l'AFPA (un organisme de droit privé travaillant dans un champ semi-public, et, jusqu'à maintenant, dans le secteur concurrentiel, sur des crédits majoritairement d'État), pour mieux traiter le coeur du sujet, qui est l'amélioration de l'efficacité de cet organisme.
2.- CONTINUER ET APPROFONDIR L'EFFORT DE RIGUEUR
Les débats de la MEC ont fait ressortir a contrario les progrès effectués par l'ANPE, comparativement à l'AFPA, jugée moins souple et moins réactive.
Dans le cadre du nouveau contrat de progrès, et après le bilan tiré du précédent contrat portant sur les années 1993-1998, la nouvelle direction a commencé à réorganiser l'organisme, notamment la fonction comptable (« Une sorte de dispersion s'est faite par agrégation d'un ensemble d'environ six à sept cent comptables, dont le rôle n'est pas clair », selon M. Gilbert Hyvernat). Comme l'a précisé le directeur général de l'association, ces changements s'effectuent dans le « partenariat social extrêmement vigoureux » propre à l'AFPA. Il faut encourager ces mutations.
En tous les cas, il est évident que l'AFPA doit encore améliorer son système comptable. Elle doit aussi construire un suivi statistique précis du devenir de ses stagiaires, en déterminant notamment les taux d'abandon constatés par filières de formation, ce qui lui permettra des efforts accrus de gestion. Enfin, l'effort de recensement et de résorption des « emplois fictifs », problème évoqué devant la mission par M. Gilbert Hyvernat, devra être poursuivi et soutenu.
De manière générale, il faut que soit amélioré le suivi des bénéficiaires des différents dispositifs publics de formation afin d'en garantir une véritable évaluation.
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Compte tenu de la faiblesse des effectifs, il faut accroître les moyens du contrôle, notamment au niveau central. Il est inacceptable que certains organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), parmi les plus importants, ne soient jamais contrôlés. Le montant de certains redressements effectués ces dernières années montre la nécessité d'encourager les pratiques exemplaires et de sanctionner les dérives.
Cette augmentation des moyens du contrôle doit s'accompagner d'un « toilettage » de la réglementation, notamment en matière d'imputation des dépenses de formation, afin de prendre en compte le développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication.
b) Grâce aux chambres régionales des comptes, mieux contrôler les actions de formation menées par les régions
Compte tenu de la faiblesse actuelle du contrôle sur les politiques de formation des régions, sur l'opacité qui entoure celles-ci, et du manque de coordination au niveau local entre les différents acteurs, un renforcement du suivi des régions semble nécessaire. Il pourrait ainsi être établi chaque année une monographie sur l'action en matière de formation d'une région donnée. Ensuite, les différentes données statistiques émanant des régions devraient être harmonisées afin de permettre des comparaisons interrégionales.
Le contrôle des comptes des actions de formation professionnelle pourrait être effectué par les membres des chambres régionales des comptes, qui disposent naturellement d'une expertise quant à l'évaluation des politiques menées par les collectivités locales. Ce contrôle serait coordonné par la Cour des comptes. Ensuite, pour faciliter l'articulation des actions de formation à l'échelon régional, un lieu unique de concertation pourrait utilement réunir les représentants des OPCA, de l'AFPA, des GRETA et du conseil régional. Cette dernière instance se verrait attribuer un rôle central d'impulsion et de coordination.
Compte tenu de la complexité des circuits et des enjeux financiers, une mission d'information parlementaire serait une structure adaptée pour dresser un bilan global de la décentralisation de la formation.
c) Mieux encadrer les dépenses des organismes paritaires collecteurs agréés
Alors que le code du travail dispose que les fonds des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) peuvent être placés, mais sous réserve de conserver leur caractère liquide, M. Jean Lambert a rapporté le cas d'un FONGECIF redressé, dont les valeurs étaient placées en « valeurs pierre », « à la liquidité douteuse ». Il a aussi expliqué que les contrôleurs, à l'occasion d'un contrôle effectué sur le FONGECIF d'Ile de France, « ont assimilé le fait de conserver de l'argent à une dépense irrégulière. (...) A notre satisfaction, nous avons obtenu confirmation de la validité de l'analyse par un jugement du tribunal administratif de Paris qui a consolidé le redressement de 392 millions de francs infligés au FONGECIF Ile de France ».
Les dépenses des OPCA mériteraient donc d'être plus encadrées, notamment en ce qui concerne leurs placements et leurs achats immobiliers. La possession d'un parc immobilier doit devenir une exception dûment justifiée. Les règles de comptabilité et de gestion doivent être renforcées à cet effet. Enfin, un bilan patrimonial systématique pourrait être utilement mené.
a) Prendre en compte le coût inévitable du paritarisme
Le fonctionnement de tout organisme paritaire engendre un coût. En particulier, le dialogue social autour de la formation professionnelle, domaine très technique, exige des interlocuteurs nombreux et compétents. Il est donc nécessaire de former et d'indemniser ces personnels. Ce financement doit s'opérer dans la plus grande transparence et dans le strict respect des règles. Pour ces raisons, en 1996, il avait été institué, après accord entre partenaires sociaux, le FONGEFOR, fonds chargé de gérer la couverture des frais du paritarisme.
Comme l'a confirmé M. Jean Lambert, le contrôle est délicat à opérer : « Soit au sein d'un OPCA, une personne figurant dans l'organigramme en qualité de démarcheur auprès des entreprises pour placer les contrats en alternance ; il faudrait en permanence un contrôleur derrière cette personne pour savoir si elle fait la promotion des contrats en alternance ou la promotion de l'organisation syndicale ou professionnelle animatrice de l'OPCA. (...) A titre d'exemple on justifie la consommation des crédits par la formation de représentants de syndicats ou d'organisations professionnelles, membres des conseils d'administration des OPCA. On se limite à considérer le nombre de personnes formées et le coût de chaque formation ; on ne s'applique pas à vérifier si les formations ont réellement eu lieu. »
Une négociation interprofessionnelle pourrait dresser le bilan de la création du FONGEFOR, et, le cas échéant, formuler des propositions afin de garantir la transparence accrue des procédures.
b) Rationaliser
Une rationalisation du contrôle pourrait également passer par une décision des partenaires sociaux visant à établir un contrôle « vertical » formel des organismes mutualisateurs (du type de l'AGEFAL) sur l'ensemble des organismes paritaires collecteurs agréés, qui pourrait les inciter à un suivi rigoureux de leurs engagements.
En ce qui concerne les dispositifs comptables des organismes paritaires collecteurs agréés, il pourrait être utile de reprendre une suggestion avancée par M. Gilles Loffredo, qui consisterait à aboutir à un « calcul d'excédent unique à la même date ». De même, les organismes paritaires collecteurs agréés devraient renforcer le suivi statistique des signataires des dispositifs d'alternance et de CIF. Enfin, le déséquilibre constaté dans l'usage de la collecte du CIF et du « capital temps de formation » montre la nécessité d'une adaptation de ces dispositifs.
c) Simplifier
Il est nécessaire d'encourager les partenaires sociaux à participer à la simplification accrue du dispositif administratif de collecte, par exemple par la création d'un « centre de formalité » unique destiné à gérer les différentes contributions « formation professionnelle » (Trésor public, Centres de formation des apprentis, établissements d'enseignement, OPCA) versées le 28 février de chaque année par les entreprises et destinées à financer la formation professionnelle.
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